Selon Antoine Coubray, le Once & Done permet de répondre à la fois aux exigences des clients et aux enjeux de ROI des entreprises. Seulement, cet indicateur, très sophistiqué, requiert un niveau de maturité relativement élevé pour la plupart des organisations actuelles. D’où l’obligation au préalable, de mettre en place les conditions nécessaires à la mesure du Once & Done. Explications.
- Qui est CustUp ?
Notre métier consiste à structurer et mettre en oeuvre la relation client à distance des entreprises, en réfléchissant aux dispositifs mis en place, via les outils et le centre de contact. Nous nous appuyons sur une équipe d’une quinzaine de consultants, tous passés historiquement par l’opérationnel.
- Le Once & Done est un vrai sujet pour vous. Pourquoi ?
Chez CustUp, notre ambition est d’améliorer la performance client. Celle-ci passe par deux axes : d’une part, la satisfaction client qui génère de la fidélisation et de la recommandation ; d’autre part, la performance dans le compte d’exploitation de l’investissement client. Ce n’est donc pas anodin d’investir dans le Once & Done, dès lors que l’on constate une baisse du taux de contact et que l’on génère du ROI.
- Comment convaincre du bien-fondé du Once & Done alors que les entreprises cherchent encore à tout prix à gagner en productivité ?
Parmi les premières missions que nous avons réalisées il y a quatre ans, on nous avait demandé de baisser drastiquement les investissements du centre de contact. Nous avons décidé de prendre le contre-pied en leur expliquant que plutôt que d’avoir une DMC (Durée Moyenne de Conversation) très basse, il serait plus judicieux de l’augmenter. Ainsi, en optimisant la performance des échanges, quitte à doubler cette DMC, nous avons pu diminuer la fréquence des appels. Nous travaillons toujours avec eux aujourd’hui. En fait, le Once & Done permet de concilier les attentes à la fois côté client et entreprise : le client souhaite résoudre son problème au plus vite et l’entreprise cherche à investir de façon optimale pour répondre à sa demande.
Le Once & Done n’est pas un nouveau sujet. Et pour autant, il n’existe pas véritablement d’indicateur de ce type aujourd’hui. Pourquoi ?
Il y a deux principales raisons à cela. La première concerne le pilotage. Les data nécessaires et la finesse de pilotage pour arriver à calculer le taux sont relativement élaborées. Par exemple, nous travaillons avec une entreprise dont le prestataire qui exploite le centre de contact – plusieurs centaines positions – ne sait pas paramétrer l’outil de gestion des contacts pour calculer le taux de Once & Done ; il ne connaît d’ailleurs même pas le taux de réitération. Pire : il n’a pas mis en place, au moment du traitement du contact multicanal, de solution pour consolider les données en vue de calculer des indicateurs. Côté reporting, il est rare d’avoir structurellement des systèmes paramétrés et réglés pour permettre le suivi de ces indicateurs. La seconde raison : s’intéresser au Once & Done, c’est s’attaquer à l’origine du problème. Or, les services clients sont victimes d’un effet pervers. Ils vivent des volumes de contact via un prestataire, voire en interne. Si le responsable du service clients fait baisser les contacts nécessaires, et fait passer son service de 50 à 15 personnes, quel est son statut ? Par ailleurs, le Once & Done s’attaque fondamentalement à l’origine des problèmes et donc aux motifs de contact. Cela a pour conséquence de sortir du service clients, puis de chahuter l’organisation et le fonctionnement de l’entreprise, ainsi que le parcours client.
- Avez-vous trouvé une méthodologie ? Est-elle applicable en l’état aujourd’hui ?
Il existe en effet une méthodologie qui repose sur les parcours clients et les motifs de contact. Premièrement, il faut modéliser les parcours clients. Deuxièmement, il faut qualifier les motifs de contact et identifier le premier point de contact pour évaluer s’il y a réitération ou pas, sachant que que le selfcare et les interfaces mobiles ou web sont généralement ce premier point de contact. Ensuite, il faut chercher, en fonction du contexte dans lequel les motifs apparaissent, comment traiter ces motifs. Il convient donc croiser ces informations avec les data pour prioriser les motifs / points de contact qui ont le plus fort impact.
- L’un des obstacles souvent rencontrés est celui du multicanal…
Si l’on veut que la demande soit traitée au premier contact quel que soit le canal, il n’y a normalement pas de problème. Or, c’est souvent une fois que le client change de canal pour un deuxième contact que l’on observe de la réitération ; généralement, il faut recommencer toute la procédure. Quant au conseiller, s’il n’a pas l’information au moment de l’échange et qu’il doit chercher la réponse ou la solution auprès d’un prestataire (logistique par exemple) ou en back-office, cela l’oblige à rompre systématiquement l’interaction. D’ailleurs, point important : les contacts internes doivent être pris en compte. Si le service clients communique avec le service comptabilité pour une demande de remboursement, cela contribue à la réitération. Chez l’un de nos clients, le temps passé pour effectuer une demande de remboursement équivaut à deux ETP.
- Existe t-il des cas justement où de façon inhérente, certaines interactions nécessitent de la réitération ?
Oui, c’est d’ailleurs pour cela que calculer le nombre moyen de réitérations est plus adapté, car solder le problème du client en une seule fois n’est pas possible. C’est souvent le cas pour des contacts avec le SAV. En fait, il vaut mieux se demander, dans un process très bien organisé, de combien de contacts maximum on a besoin, plutôt que de chercher à faire du Once & Done systématique.
- Si l’on veut calculer ce taux moyen de réitération, quelles sont les conditions sine qua non ?
Au préalable, il faut que les solutions du système d’information client – qui permet d’agglomérer tous les renseignements sur un client – permettent de restituer un référentiel client unique de façon à tracer l’ensemble de son parcours (espace web, interactions téléphoniques, mail ou autre) ; ou a minima, une mécanique qui consolide l’identité d’un client. Il faut aussi qu’un motif de contact soit relié à un ticket ouvert et rattaché à une séquence d’interactions pour ce même motif. Ce ticket doit avoir un début et une fin.
- Doit-on associer le Once & Done avec d’autres indicateurs ?
Tout l’intérêt est surtout de pouvoir modéliser d’un point de vue économique, les actions mises en place. Combien cela coûte aujourd’hui de traiter du début à la fin un problème dans l’entreprise ? Et quel serait l’impact sur les coûts de traitement si l’on mettait en place le Once & Done ?
- Quelles entreprises peuvent véritablement s’attaquer à ce type de projet ?
Ce sujet correspond à un certain niveau de maturité dans certaines entreprises. Si une nouvelle société se créée, elle peut mettre en place un système d’information qui couple nativement les données client et produit, et ainsi travailler dès le départ de façon élaborée. Pour des entreprises avec de l’ancienneté, les premiers chantiers concernent rarement ce genre de sujet ; ils sont davantage consacrés à l’optimisation de la gestion du multicanal, le selfcare, le SEO, la gestion des matrices flux-compétences, la base de connaissance, etc. Le Once & Done est un sujet passionnant, mais il correspond soit à un niveau de maturité élevé, soit à une intégration directe dans le design de jeunes entreprises. C’est tout le décalage entre les tendances et la réalité du marché.