Doit-on se satisfaire de la satisfaction de ses clients ?

Satisfaction Client

La satisfaction client est d’autant plus importante aujourd’hui qu’avec les réseaux sociaux, les clients peuvent faire tomber la réputation d’une marque en quelques secondes. Pour autant, les entreprises savent-elles travailler les différentes dimensions qui contribuent à la satisfaction de leurs clients ? Eléments de réponse dans cet article qui propose notamment 10 bonnes pratiques.

Si tout le monde aujourd’hui s’accorde à reconnaître l’importance vitale, pour toute entreprise, de soigner la satisfaction de ses clients, les moyens d’y parvenir – et l’effort à déployer – sont loin d’être d’homogènes. Certaines entreprises misent tout sur la fidélité, tandis que d’autres se contentent du minimum. Les unes parient sur le service client, d’autres sur la qualité du produit. Quand aux outils de mesure, ils sont aussi diversement utilisés qu’il existe de cas d’application.

La principale raison à cette hétérogénéité est à trouver dans l’évolution de nos économies de marché. Pendant les 30 glorieuses (1945-1975), la demande était si forte qu’il était relativement facile de trouver des clients. L’effort portait surtout sur la fabrication de produits en quantité suffisante pour satisfaire aux volumes de consommation exigés. A partir des années 70, et surtout après la crise pétrolière de 73, le marché a progressivement changé de nature. Pour séduire des consommateurs plus exigeants et rigoureux dans leurs choix, mais aussi pour faire face à une concurrence accrue par l’internationalisation des économies, les entreprises ont remis le client – plutôt que le produit – au centre de leurs préoccupations. Le web a encore accéléré ce processus à partir des années 2000, quand on a constaté que si un client se plaint d’une marque sur les réseaux sociaux, l’effet s’en fait directement sentir sur la valeur de l’entreprise.

Pour autant, les deux tendances – orientation produit, orientation client – restent à part égale au sein de chaque entreprise. S’y joue chaque jour un débat entre les tenants de la satisfaction client et les apôtres de l’optimisation. Ces derniers se méfient des paris sur l’avenir, qu’ils jugent incertains, et préfèrent une politique d’assèchement aux résultats financiers immédiatement perceptibles : cost killing, dépenses contrôlées, investissements prudents. A l’inverse, les premières cités, que l’on trouve plutôt dans les départements opérationnels, comme les ventes, le marketing et le service client, militent pour des mesures fortes en faveur de la fidélisation clients.

Quels sont leurs arguments ? On peut lister quatre grands types de bénéfices à attendre d’une politique généreuse à l’égard des clients.

  • Améliorer l’image de l’entreprise, avec pour conséquence d’augmenter le CA. Plus le client est satisfait du produit, plus il le re-commande. Et plus il le recommande, en un mot : un client très satisfait est le premier ambassadeur de la marque.
  • Améliorer la rétention, c’est-à-dire la durée pendant laquelle un client va rester fidèle à la marque. Ce qui est en jeu ici, c’est la marge dégagée par client. Elle est en effet très nettement supérieure chez un client très fidèle. D’après l’étude menée par Schulze et al. (2012) une augmentation de 10% du capital client (valeurs à vie des différents clients) conduit à une augmentation de 15,5% de la valorisation boursière de l’entreprise.
  • Améliorer la motivation interne des collaborateurs, donc leur productivité. Un collaborateur qui entend dire par un client qu’il trouve que le produit est génial, ou que le service client est de haut niveau, développe automatiquement un engagement pour son employeur bien supérieur à la moyenne.
  • Améliorer la prise de conscience de la valeur de l’entreprise par les investisseurs. Par exemple, depuis près de 10 ans, Trusteam Finance prend en compte la satisfaction client dans sa méthodologie d’investissement. Jean Luc Allain, Directeur Général : « On peut constater que 15 % des clients les plus fidèles d’une entreprise, contribuent à 60 % des ventes totales. »

A l’inverse, l’insatisfaction client coûte cher. Elle génère des coût directs et indirects ! Non seulement elle demande une débauche d’énergie pour le conserver, mais c’est bien souvent à perte. Selon le cabinet de conseil Livework studio, 91% des clients insatisfaits ne referont pas d’achat auprès de la marque et se tourneront vers la concurrence.

Si ces arguments ne suffisent pas à convaincre les directions générales d’adopter une approche fondamentalement orientée satisfaction, c’est que le sujet est complexe, voire épineux. Rien ne garantit que l’approche obtiendra des résultats à la hauteur des efforts déployés. Il ne suffit donc pas de vouloir mais de savoir, et c’est ici qu’il faut se pencher sur le concept même de satisfaction client.

satisfaction client
voix du client

Ce qu’est la satisfaction client

La satisfaction client peut être définie comme l’état de contentement d’un consommateur suite à l’achat d’un produit ou d’un service. Dit autrement, c’est le sentiment neutre, négatif ou positif qu’un consommateur a d’un produit, d’une marque ou d’un service. La satisfaction client est positive lorsque les attentes sont comblées, elle est négative dans le cas contraire. Ou, comme l’écrivait Yves Evrard en 1993 : « La satisfaction est un état psychologique consécutif à une expérience d’achat/de consommation et relatif. »

Le terme relatif est ici essentiel. La satisfaction client n’est pas une valeur absolue mais un état relatif à une attente initiale. Si j’ai un simple téléphone mobile et que je découvre toutes les fonctionnalités d’un smartphone, nul doute que j’en serai satisfait, même s’il ne s’agit que d’un produit moyen de gamme ; mais si je possède déjà le dernier modèle d’iPhone et que je l’utilise depuis des semaines, je serai forcément déçu d’un appareil de moindre qualité. D’autres auteurs ont bien montré cette importance de la relativité dans la notion de satisfaction client. Ainsi, Sylvie Llosa l’a définie comme « fondée sur une comparaison de la performance perçue du service avec un standard préétabli. » Dès 1980, le chercheur Richard L. Oliver avait publié un modèle simple, le « paradigme cognitif », qui définissait la satisfaction client comme le résultat de la comparaison entre qualité/performance attendue et qualité /performance perçue d’un produit ou service :

  • Si la qualité perçue est inférieure à la qualité attendue, le résultat est une insatisfaction
  • Si la performance perçue est égale à la qualité attendue, on parle alors de normalité ou satisfaction
  • Si la qualité perçue est supérieure à celle attendue, le résultat est une forte satisfaction

La satisfaction client étant un sentiment, sa mesure est forcément délicate. Mais on peut simplifier le propos en affirmant qu’il existe deux grandes dimensions :

  • Factuelle : satisfaire un client dépend de faits précis (qualité du produit, délais de livraison, prix…) qui ressortent du cognitif
  • Emotionnelle : le comportement du vendeur, la réactivité du service client, l’amour de la marque sont autant d’éléments qui influent sur la perception du client, de façon beaucoup plus subjective.

Il faut d’ailleurs noter que la dimension affective et émotionnelle, longtemps peu considérée, joue un rôle de plus en plus important. Selon le rapport « How emotions drive genuine engagement » publié en décembre 2017 par l’institut DTI (Digital transformation institute) de Capgemini, les émotions ont un impact considérable sur la fidélité des consommateurs. Les enseignes parvenant à créer un lien émotionnel avec leurs clients ont vu leur chiffre d’affaires annuel augmenter de 5%…

Dès lors, comment mettre en place une politique orientée client pour s’assurer de leur satisfaction ?

livraison

Les bonnes pratiques pour améliorer la satisfaction client

Il existe une pléthore de publications sur le sujet. Les 10 principales recommandations sont les suivantes :

  1. Nommer un responsable satisfaction qui puisse agir de façon transversale sur l’ensemble des départements de l’entreprise impliqués dans la relation client, c’est-à-dire… pratiquement tous les services !
  2. Fixer un cadre de référence. Qu’est-ce qu’un client satisfait ? Cette question peut se scinder en deux questions : quels sont les différents types de clients et quand peut-on considérer que chaque type est satisfait ? Sur la première question, on se rapprochera du marketing et de ses travaux sur les Persona clients. Pour la seconde, on pourra trouver des éléments de réponse au terme d’une enquête qualitative auprès d’un échantillon représentatif de chaque persona.
  3. Exercer une veille constante, sur les clients mais aussi sur les pratiques du marché, les concurrents… La connaissance du contexte dans lequel on opère est indispensable à cette mission, car la satisfaction est aussi affaire de confiance, et la confiance, de crédibilité. Comment espérer gagner le respect d’un client si on ignore qu’il vient d’être racheté, ou que son activité est désormais placée sous une réglementation plus stricte ?
  4. Un cran plus en profondeur : se mettre en situation d’écoute des besoins clients. Ecouter le client, c’est d’abord comprendre ce qu’il attend, et pour cela poser les bonnes questions. Tout un art ! Mais c’est aussi faire appel à la technologie, par exemple pour analyser les verbatims au sein du Centre de Contact (Voice of Customer).
  5. L’écoute doit être doublée par l’observation de l’expérience vécue par le client à chacune des étapes de son parcours, depuis le premier contact en magasin ou sur le site web, jusqu’au jour où il décide de quitter la marque après en avoir été client. Si chacune des étapes contribue généralement à la satisfaction, certaines sont plus importantes que d’autres selon l’activité de l’entreprise. Ainsi, dans le secteur hôtelier, des études ont prouvé que le niveau de lumière dans les couloirs d’un hôtel pouvait augmenter ou baisser de plusieurs points le niveau de satisfaction des clients. Apparemment, il n’est rien de plus angoissant qu’un couloir sombre, avec toutes ces portes prêtes à s’ouvrir… Une conséquence inattendue du succès de Shining, peut-être ?
  6. Attention à traiter toutes les demandes. Il n’y a pas de petit client. Un client mécontent peut manifester son dépit sur les réseaux sociaux, ou en parler dans un club, et faire baisser de plusieurs crans l’image de marque, décourager d’autres clients, dissuader des partenaires, susciter l’intérêt de journalistes, faire reculer des investisseurs. Aussi, plutôt que prioriser par le haut (je traite en priorité les demandes des clients à fort potentiel), il est recommandé d’appliquer à tous, équitablement, un service minimum garanti de qualité supérieure.
  7. En lien avec le point précédent, se montrer particulièrement attentif aux irritants. Dans le rapport “Le pouvoir prédictif de la satisfaction client” (2005), Christiane BUGHIN mène une étude assez précise qui conclut à l’existence d’une relation positive entre, d’une part, des indicateurs liés au traitement des plaintes-clients et au respect des délais de livraison, et d’autre part, des mesures comptables de performance.
  8. Les points 6 et 7 ne doivent pas empêcher de chercher le nec plus ultra de la relation client : l’enchantement. Enchanter un client passe par 4 piliers : considération, récompense, surprise et approche humaine. Mais ces points feront l’objet d’un autre article.
  9. Concilier les points 6 (tous les clients à la même enseigne), 7 (se concentrer sur les irritants) et 8 (chercher l’enchantement de la relation) est possible à condition d’automatiser toutes les phases de la relation qui peuvent l’être. Par exemple, en équipant le conseiller de clientèle du centre de contact d’un outil logiciel doté des dernières innovations (interface omnicanale nativement unifiée, canaux voix et digitaux, routage intelligent, IA d’aide à la réponse…).
  10. Enfin, impliquer tous les collaborateurs pour s’assurer que tous les points précédents seront pris en compte, non pas seulement par le responsable satisfaction de l’entreprise, mais bien par toutes ses forces vives.

Une fois ces pratiques mises en œuvre, il ne vous reste plus qu’à mesurer les progrès observés en matière de satisfaction client. Là aussi cependant, il existe une multitude d’indicateurs dont l’usage trouvera une pertinence en fonction du contexte. Parmi eux, citons :

  • En tout premier lieu, les indicateurs qualitatifs fournis par l’analyse des verbatims. Aucun chiffre ne vaut la parole d’un client, surtout si elle est donnée sans contrainte. Les alertes et tendances remontées par les outils de VoC sont essentiels désormais à la bonne marche de l’entreprise.
  • Les indicateurs classiques : NPS, CSAT, CES… Le CES paraît de plus en plus pertinent et fréquemment utilisé. Le Customer Research Council avait montré dès 2009 que l’indicateur le plus fiable de la fidélité client est la quantité de travail qu’il doit faire pour obtenir le produit ou service : plus elle est élevée, moins il sera attaché.
  • Des indicateurs contextuels : Intention de réachat, fréquence de visite par visiteur unique, nombre de connexions à un compte client par client unique, taux d’attrition, pourcentage de commandes passées avec une carte fidélité…

Chez AKIO, nous essayons le plus possible d’adopter les bonnes pratiques décrites ci-dessus. Il nous reste de nombreux efforts à fournir mais nous constatons un taux de satisfaction client deux fois supérieur à la moyenne du secteur. C’est évidemment un résultat… satisfaisant, en même temps qu’un challenge. Car il faut impérativement rester à ce niveau élevé, voire même l’augmenter, au risque de provoquer un effet déceptif d’autant plus fort qu’on tombe de haut. Il n’y a décidément pas loin du Capitole à la roche Tarpéienne, et on ne peut jamais se satisfaire d’avoir satisfait ses clients !